Géographie – Démographie De la discrimination foncière à la crise urbaine à N'Gaoundéré, (Cameroun)

Résumé

Les travaux traitant de l'urbanisation anarchique dans les pays du Sud lient couramment ce phénomène, certes à des degrés divers, à l'inefficacité des mesures visant la maîtrise des mutations foncières dans les zones en prise à la production urbaine. Il n'est point de doute que N'Gaoundéré, une ville du Nord-Cameroun subit aussi ce phénomène du fait de cette inefficacité. Toutefois, le repli identitaire dont font montre les différents groupes propriétaires traditionnels au cours des opérations d'appropriation et/ou d'attribution foncière nuit considérablement à toute initiative de planification du développement de cette ville, d'où le désordre urbain qui s'y est établi. La zone urbaine de Mabanga constitue à l'épreuve des faits présentés et commentés dans le présent article, une plate-forme de choix à partir de laquelle l'introversion des communautés propriétaires traditionnelles locales en matière d'appropriation foncière se perçoit le mieux. En planchant sur les modes d'acquisition et de sécurisation socioculturels de cent quarante-huit propriétés enquêtées en 2011, soit environ un quart des unités foncières privées d'une zone urbaine vaste d'environ 150 hectares, cet article examine d'une part l'implication des groupes de propriétaires en présence dans les mutations foncières opérées dans la zone et d'autre part, les enjeux pour lesquels se mobilisent les groupes propriétaires antagonistes. Au bout du compte, on retient que l'affrontement permanent des groupes Gbaya-Mboum-Dii d'un côté et Foulbé-Haoussa
de l'autre côté alimentent une crise dont le désordre urbain n'est qu'une matérialisation
palpable. En effet, ces dissensions intercommunautaires instaurent une conjoncture
défavorable pour une production urbaine concertée. Mabanga est donc l'illustration d'une
zone urbaine en crise c'est-à-dire un lieu impropre à une production saine et cohérente de la
ville.