LA REPRÉSENTATION DES RELIGIONS TRADITIONNELLES DANS L’OEUVRE DE SEYDOU BADIAN
Résumé
Les religions traditionnelles africaines tiennent une place fondamentale et sont pourtant très peu étudiées dans l’œuvre de Seydou Badian.1 Sujets explicites des romans de la maturité, Le Sang des masques (1976, achevé en 1971) et Noces sacrées (1977), elles font également l’objet de longs développements dans son premier ainsi que dans son dernier roman (Sous l’orage, 1955 ; La Saison des pièges, 2008), comme aussi dans son unique pièce de théâtre, La Mort de Chaka (1961). Conformément aux points de vue exposés dans ses essais, Les Dirigeants africains face à leur peuple (1961) et Congo. Terre généreuse, forêt féconde, les religions traditionnelles sont présentées comme porteuses de valeurs spirituelles, intellectuelles et éthiques profondes, à caractère universel, en même temps que des éléments essentiels peut-être les plus essentiels de l’héritage culturel africain. Particulièrement intrigant : dans les deux romans intermédiaires, Le Sang des masques et Noces sacrées, tout se passe comme si ces religions étaient empiriquement fondées. Une telle vision, chez un homme politique aux sympathies révolutionnaires, par ailleurs chargé des programmes de développement, a de quoi surprendre ; cependant, son approche rejoint celle d’un important courant de la littérature et du cinéma maliens. Par comparaison, l’islam et le christianisme font l’objet d’une attention moindre. L’islam, dépeint comme essentiellement urbain et fortement syncrétique, fait l’objet de conversions motivées par la bienséance (le patriarche Benfa, dans Sous l’orage) ou plus rarement par conviction (le père du médecin, dans Noces sacrées).2 Le christianisme, décrit principalement dans cette dernière œuvre (on y trouve quelques allusions dans Les Dirigeants africains face à leur peuple et La Saison des pièges) susciterait peut-être des adhésions moins nombreuses mais plus complètes. Il convient de ne pas oublier qu’à l’époque où se situent trois des quatre romans de Seydou Badian (le début des années 1950), les religions traditionnelles étaient vraisemblablement encore majoritaires au Mali ; mais l’intérêt que cet auteur leur accorde reflète assurément aussi leur caractère spécifiquement africain. Dans le bref espace qui nous est imparti, nous analyserons succinctement la représentation des religions dans chacune des principales œuvres de Seydou Badian, avant de tenter de la situer dans le contexte de la création littéraire et artistique malienne.Téléchargements
Publié-e
2023-03-06
Numéro
Rubrique
Articles